Dans cet interview réalisée le mardi 23 mars 2021, l’invitée du jour est Oriane Cochand, la directrice du Centre professionnel du nord vaudois (CPNV) depuis 2018. Parcours professionnel, rôle au sein du CPNV, Oriane Cochand nous ouvre son univers.
Quel est votre rôle au sein de cet établissement ?
Si on imagine l’école comme un grand navire, mon rôle est un peu comme le capitaine du navire. Je vais dire dans quelle direction on va aller, je vais regarder si tout le monde est sécurisé à son poste et se sent bien. Permettre à chacun de donner le meilleur de lui-même. Fédérer une équipe pour arriver à destination.
Quelle est la tâche la plus difficile pour vous à gérer ?
Le plus difficile, ce n’est pas en termes de tâches, mais de gérer parfois mes angoisses. C’est difficile pour moi, quand je me rends compte que certaines choses que j’ai faites sont hors de ma portée, par exemple des choses qui ont un impact dans les médias ou un impact politique, et que je ne sais pas ce qui va arriver.
Et la tâche qui vous plaît le plus dans ce travail ?
Accompagner chacun pour qu’il puisse grandir, mais en plus qu’il puisse sortir de sa propre vision, sortir d’une vision autocentrée et penser collectif. J’adore cela !
Quelles-sont les qualités indispensables pour mener à bien ce rôle?
Il y en a plusieurs. Je n’ai d’ailleurs pas la prétention de les avoir toutes, mais ce sont des qualités vers lesquelles je tends et qui pour moi sont importantes !
Tout d’abord, avoir des idéaux. Je parle souvent aux élèves d’avoir des rêves. Et puis, après avoir le courage de travailler tous les jours dans cette vision-là. Je dis « avoir le courage », parce que quelquefois, on nous menace, on nous empêche, et puis il faut avoir le courage de dire : « C’est ce à quoi je crois et je vais continuer là-dedans. »
Avoir de la discipline et de la cohérence. Il faut y travailler tous les jours. Avancer petit bout par petit bout, cinq minutes par cinq minutes et à la fin de l’année, on a fait des choses extraordinaires.
Si je prends une décision parce que je crois que c’est la bonne, c’est sûr que je vais devoir revenir en arrière. Je suis obligée d’écouter les gens. Et quand on a beaucoup écouté, là on peut prendre une décision. Il faut faire confiance aux gens ! Être persuadé que l’ensemble vaut plus que la somme des parties. Si on est sûr que l’on est mieux ensemble, on va vraiment plus loin !
Pensez-vous que c’est plus difficile pour une femme de monter les échelons au niveau hiérarchique ?
C’est vrai qu’il y en a très peu de directrices dans le secondaire deux, mais je ne pense pas que la société rende ça difficile. C’est plutôt le contraire maintenant. On cherche des femmes à ce poste-là. Parce qu’on a besoin d’un équilibre, on va vers un type de gouvernance qui veut plus ce qu’on appelait avant des «qualités un peu féminines ». Maintenant tout le monde les développe, mais avant, c’était chez les femmes ce côté empathie, conscience collective, collaboration, de ne pas avoir besoin d’avoir raison. C’est peut-être même un avantage en ce moment, sauf si on est une femme qui fait tout à la maison : s’occuper des enfants, faire les courses et le ménage…là ça devient un handicap parce que l’on ne peut pas tout gérer.
La pandémie du covid-19 a de nombreuses répercussions dans tous les domaines. Le CPNV n’est malheureusement pas épargné. Comment vivez-vous cette situation ?
Moi je la vis bien, je n’ai pas de soucis. Dans l’enseignement, c’est plutôt facile parce que les gens ont leur salaire à la fin de chaque mois. Et puis, c’est le job des enseignants d’apprendre à jongler avec diverses modalités pédagogiques. Mais ceux qui ont le plus souffert, ce sont les jeunes. Vous, vous avez perdu vos repères, parce que quand on est dans cette période d’adulescence ou d’adulte émergent, ce ne sont plus nos parents, mais nos amis qui nous guident. Les cercles sociaux, vous n’avez pas pu les avoir. Je pense que les ASE qui ont dû travailler dans des situations très compliquées avec des crèches sans masques, des décès dans les EMS…cela a été nettement plus compliqué que pour nous dans l’enseignement.
Avez-vous des projets pour l’avenir du CPNV ?
J’ai plutôt des lignes directrices. Les générations vont de plus en plus vite. Je pense que nous aussi, nous devons nous adapter de plus en plus vite. Nous ne pouvons pas rester sur des acquis et enseigner comme il y a 30 ans. Il faut être plus réactifs, changer régulièrement et aller à la rencontre des élèves. Si on ne sait pas ce qu’ils vivent et ce dont ils ont besoin, on n’arrive pas à compléter. Il faut qu’on prenne l’habitude de garder le contact pour mieux comprendre vos besoins et pouvoir compléter ce qu’il vous manque pour que vous soyez armé.e.s pour le monde.
Je rêve d’une école vivante, une école dans laquelle les élèves s’investissent, qui ont envie de faire des projets. Cette gazette, c’est génial ! J’aimerais qu’à 7 heures 30, il y ait plus d’activités ici avant le début de l’école. J’aimerais qu’on puisse créer plus de vie au-delà des cours. Et cela passe par des apprenti.e.s qui partagent leurs idées, leurs projets !
<<Il faut croire en ses rêves et avoir le courage de travailler chaque jour dans cette vision-là ! >>
Oriane Cochand